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Jour 7 - Déjeuner à Sourp Guiragos

 
 

 

14 jours à Diyarbakir - 14 photos d'Amed - 14 textes sur Tigranakert

Envoyé spécial de "Repair", MJM, journaliste français d'origine arménienne, a passé deux semaines dans l'actuelle capitale du sud-est anatolien, à Diyarbakir (Amed en kurde et Tigranakert en arménien) pour partir à la rencontre du passé, du présent et du futur des Arméniens qui étaient des milliers à peupler cette ville avant le Génocide de 1915. Au fur et à mesure de ses pérégrinations, MJM nous fait partager ses rencontres avec des lieux, des femmes, et des hommes dont l’histoire est liée, d’une façon ou d’une autre, avec les Arméniens.

Ce photoreportage date de mai 2013, certaines situations évoquées dans ces articles ont évoluées depuis.

Jour 7 - Déjeuner à Sourp Guiragos

Dimanche, 10 heures, l’église Sourp Guiragos est en pleine effervescence. Une dizaine de personnes s’affaire dans ce qui faisait office d’église lorsque le lieu était encore la propriété de l’Etat turc et servait de dépôt. Des dizaines de plats apportés par les membres de la communauté sont déposés sur une table qu’on rallonge à mesure de leur arrivée. Beuregs (feuilletés au fromage), salades, fromages, tahine, biscuits et gâteaux s’ajoutent progressivement tandis que les enfants entament une partie de foot juste à côté. Avant de commencer à manger, chacun joint ses mains pour une prière improvisée par Kévork, le professeur d’arménien. Puis l’écrivain Mıgırdiç Margosyan, de passage à Diyarbakir, prend la parole : « Il faut vivre le jour présent sans que le passé soit un fardeau. Nous devons être fiers d’être arméniens et fiers d’être des êtres humains. Nous ne sommes ni au-dessus ni en- dessous de personne. Pleurer sur les ruines du passé ne sert à rien » déclare-t-il. « Il y avait une habitude ici, celle de récolter de l’argent pour les pauvres. Je me rappelle encore du son que faisait le tintement des pièces. C’est grâce à cette solidarité que cette église est là aujourd’hui. La solidarité, c’est le plus important » ajoute l’écrivain.

Il pleut ce dimanche-là, mais tant pis. Pour moi, c’est incroyable de me retrouver là, au milieu d’Arméniens, dans un moment de pur partage. Sourp Guiragos est bien le centre névralgique de cette petite communauté qui tente de se reconstruire après des années de sommeil forcé. Et peu importe si la grande majorité des personnes rencontrées n’accorde que peu d’importance à la religion. « Les gens se réunissent ici régulièrement, tout simplement pour se rencontrer et être ensemble » m’assure Şinow, un jeune homme anglophone qui travaille dans cet endroit depuis seulement quelques semaines.

« Assieds-toi et mange ! » m’ordonnent gentiment les dames qui s’affairent alentour apportant du thé et préparant des assiettes pour les retardataires et les inconnus de passage. « Il y a encore plein de gens qui ont peur et qui ne viendront jamais ici. Ils n’ont pas encore trouvé le courage. Moi je suis là où se trouve la vérité » explique Halidé, 58 ans, originaire de Elazîg qui nous confie dans le brouhaha qu’elle n’avait jamais été en contact avec des Arméniens jusqu’à maintenant. Les visages que j’aperçois me semblent étrangement familiers et même si la communication est difficile, un simple sourire suffit le plus souvent pour se comprendre. Aussi, lorsqu’un peu après midi le muezzin de la mosquée juste en face fait son adhan, personne ne semble y faire attention. Le micro climat de Sourp Guiragos certainement…

 

Journaliste et photographe freelance de 30 ans, MJM a travaillé pour divers journaux et magazines. Depuis quelques années, il développe également son regard à travers des reportages photo pour l’ONG "Yerkir Europe" en Arménie et en Turquie. Un aperçu de son travail est visible sur son site Internet, www.mjm-wordsandpics.com.

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